Cameroun
Ce pays d’Afrique de l’Ouest, indépendant depuis 1960 (1), s’étend du golfe de Guinée au lac Tchad, entre 12° et 2° de latitude Nord. Il appartient à la fois, par son relief et sa structure géologique, à l’Afrique occidentale et à l’Afrique orientale. Il est le sixième producteur mondial de cacao. Le cacao est sa principale culture d’exportation.
(1) La République Fédérale du Cameroun comprit à partir du 1er octobre 1961 le Cameroun oriental (432 000 km2), francophone, et le Cameroun occidental (43 000 km2), anglophone.
La cacaoculture fut introduite au Cameroun à la fin du XIXe siècle. Des plants d’amelonado furent importés de Saõ Tomé ou de Fernando Póo (auj. Bioko) par les missionnaires baptistes. En 1884, lorsque le pays devint colonie allemande, des plantations étaient déjà en place dans la région de Victoria. Le jardin botanique de Victoria introduisit ensuite d’autres variétés de forasteros, provenant de Saõ Tomé et de Trinidad. Et à partir de 1896, la culture se fit à une plus grande échelle. Paul Preuss devait observer au tout début du XXe siècle : « le cacao semé et actuellement cultivé au Kamerun n’appartient qu’à des variétés de qualité moyenne et de valeur secondaire », tout en reconnaissant qu’il « obtient néanmoins des prix très acceptables » et en concluant que des « méthodes de fermentation plus rationnelles » permettraient de « diminuer considérablement le goût sauvage et amer du cacao et faire disparaître complètement l’odeur aigre qu’il dégage ». À la veille de la Grande Guerre, à l’époque du Neu-Kamerun (1911-1914), plus de 11 000 hectares, sur les pentes du mont Cameroun, portaient des cacaoyers. À l’est du pays, le cacao s’implanta d’abord près de Douala et de Kribi, puis dans les environs d’Edéa. Il se déplaça ensuite plus à l’est vers Ebolowa et Yaoundé et s’étendit jusqu’à Abong-Mbang et Batouri. Les Allemands imposèrent la culture du cacaoyer aux paysans Fangs du Woleu-Ntem. Cette région abritait la plus grande plantation mondiale, fief de la West Afrikanische Pflanzungs Gesellschaft Victoria (WAPV), fondée en 1897 et vaste de 15 000 hectares, dont 4 000 consacrés au cacao.
Le conflit terminé, la diffusion des matières premières agricoles — les plus importantes étant, notamment, le café et le cacao — passa aux mains des administrations française et britannique. Le système des grandes plantations fut en partie abandonné, au profit de petites propriétés familiales. Au milieu des années 1920, la cacaoculture se propagea. Entre 1919 et 1939, la production du Cameroun Oriental, alors sous tutelle française, doubla quasiment tous les quatre ans : 3 000 t en 1918, 7 000 t en 1928 et 30 000 t en 1938. C’est surtout sur le plateau méridional (500-900 m), de Yaoundé à la frontière du Gabon, que se développèrent les plantations. La région d’Ebolowa s’imposa comme le centre de collecte du cacao, ensuite exporté par le port de Kribi, puis par le port de Douala. Si au cours de la période 1901-1904, les campagnes annuelles s’élevaient à environ 1 000 tonnes, elles atteignirent 41 000 tonnes après la Seconde guerre mondiale. Toutefois, une partie des plantations européennes disparut, suite à la crise de 1929-1930. Après des mesures contraignantes (code de l’ingénat, impôt de capitation), une politique de soutien aux planteurs fut instaurée ; la production fut alors encouragée par des aides financières, la mise en place de centres de recherches et de vulgarisation agricoles, etc. En 1949 fut créée, près d’Ebolowa, la station de recherches de Nkoemvon, pour l’amélioration des méthodes culturales et du matériel végétal. En même temps fut inauguré le laboratoire de phyto-pathologie et d’entomologie, en charge d’étudier les maladies du cacaoyer et de mettre au point les moyens de lutte contre ces maladies. Établissement public fondé au début des années 1950, le S.E.M.A.C. (Secteur Expérimental de modernisation des cacaoyères) joua surtout un rôle d’encadrement et de vulgarisation, très apprécié des planteurs. Mais il disparut au profit d’un organisme de même type, le SEMCENTRE, consacré à la seule région Administrative du Centre-Sud. Également destinée à assister le planteur, la Caisse de Stabilisation, établie en 1955, eut pour mission de protéger le planteur des fluctuations et aléas du commerce international et de subventionner certaines opérations d’aide à la production.
En 1963-1964, après l’indépendance du pays et la fédération des deux Camerouns, la production cacaoyère s’éleva à 93 235 tonnes, dont 85 200 tonnes pour le Cameroun Oriental qui affichait une surface totale de 357 500 hectares de plantations. Comme l’explique alors J. Champaud : « les espèces cultivées au Cameroun ne sont pas homogènes ; en l’espace d’une soixantaine d’années, et sous l’effet de plusieurs administrations successives, les premières variétés introduites se sont hybridées. La plupart des cacaoyers en place sont de l’espèce Forastero : Amellonado (à cabosses jaunes) et Cundeamor (à cabosses rouges), ces derniers étant les plus nombreux. Les boutures distribuées par les stations de recherches sont des associations soit de clônes d’origine locale, avec dominante de Trinitario, soit de clônes d’origine étrangère, Trinitario ou “ Upper Amazon ” (de type Forastero), associés à des clônes locaux. » Les exploitations étaient, en moyenne, légèrement supérieures à 2,5 hectares, dont un quart voyait cohabiter cacaoyers et cultures vivrières. Les méthodes culturales étaient encore archaïques, et, écrit Champaud, mieux valait, dans la plupart des cas, parler de « cueilleurs » de cacao que de planteurs. « Les défauts de cette culture sont nombreux, et bien connus : le renouvellement insuffisant des vieilles plantations, le semis des fèves au mileu des champs vivriers déjà épuisés, le peu de soins portés aux arbres ou l’insuffisance des traitements phytosanitaires conduisent à des rendements très faibles ; la mauvaise fermentation, un séchage insuffisant ou un stockage défectueux aboutissent à un trop fort pourcentage de cacao de médiocre qualité. » Tous défauts auxquels organisations officielles et planteurs allaient s’employer à remédier. Au tournant des années 1970, le pays exportait pour 50 % du cacao et du café. La progression fut ensuite constante — le Cameroun devint le quatrième producteur mondial —, avant que ne se produise une stagnation qui dura jusqu’en 2008-2009.
Si la production camerounaise reposa longtemps, pour l’essentiel, sur le trinitario, aujourd’hui, de nouveaux hybrides sont produits par l’IRAD, organisation chargée de la recherche cacaoyère, et vulgarisés en milieu rural par la SODECACAO, Société de Développement du Cacao. Ces croisements ont pour double avantage de mieux résister aux capsides et à la pourriture brune, particulièrement redoutés au Cameroun, et de présenter une meilleure productivité — 700 à 1 000 kg / ha au bout de dix-huit mois, au lieu de 369 kg / ha au bout de cinq à six ans dans le cas des variétés datant de la colonisation. En 1986-1987, la cacaoculture couvrait 453 000 hectares. À l’heure actuelle, elle concerne plus de 600 000 petits planteurs et fait vivre quelque 6 millions de personnes. deux structures, créées après la libéralisation du secteur cacao, gèrent son organisation : l’une étatique, l’office national du cacao et du café (oncc), chargé du suivi de la qualité à l’exportation et de la représentation de l’État auprès d’organismes internationaux du cacao et du café ; l’autre privée, le conseil interprofessionnel du cacao et du café (cicc), qui regroupe les organisations professionnelles et a pour mission d’organiser le marché intérieur du cacao et du café. Par ailleurs, le Fonds de Développement du Cacao et du Café (FODECC) a pour tâche d’apporter un soutien financier aux projets afférents au cacao et au café.
En dépit d’une maladie qui attaque les racines des arbres et provoque le dépérissement de ceux-ci, la campagne 2010-2011 accusa un augmentation, qu’expliquent l’amélioration des manipulations post-récolte et les bonnes conditions climatiques. le pays espère atteindre un production de 250 000 à 320 000 tonnes en 2015. Le cacao constitue 40 % des exportations du secteur primaire ; le pays exporte 85 % de sa production, le reste étant traité sur place. En 2002, Barry Callebaut, ADM et Cargill contrôlaient, à eux seuls, 95 % des exportations de cacao du Cameroun. la consommation locale est très faible, mais elle constitue un potentiel qui demande à être exploité. C’est à quoi s’emploie le gouvernement, qui vise à transformer 30 % de la production nationale à l’horizon 2015. C’est à quoi s’emploie également l’entreprise noha nyamedjo, groupe de négoce œuvrant au développement du cacao au cameroun, à travers un projet d’usine de traitement. Quant à l’entreprise de broyage, Sic-Cocoa, filiale de Barry Callebaut, elle transforme les fèves de cacao (25 000 à 30 000 tonnes par an) en liqueur de cacao, en beurre de cacao et en tourteaux de cacao. Si la plupart de ses produits sont exportés, certains sont destinés à la Chocolaterie Confiserie Camerounaise (Chococam), de Douala, qui appartient à la firme sud-africaine Tiger Brands.
Cameroun : production de cacao
en milliers de tonnes
1893-94 0,135
1894-95 0,120
1895-96 0,133
1896-97 0,170
1897-98 0,209
1898-99 0,246
1899-1900 0,261
1900-01 0,528
1901-02 0,648
1902-03 0,800
1903-04 1,000
1904-05 1,000
1905-06 1,000
1906-07 2,000
1907-08 2,000
1908-09 3,000
1909-10 3,000
1910-11 4,000
1911-12 5,000
1912-13 5,000
1913-14 3,000
1914-15 3,000
1915-16 4,000
1916-17 4,000
1917-18 3,000
1918-19 2,000
1919-20 3,000
1920-21 3,000
1921-22 3,000
1922-23 3,000
1923-24 4,000
1924-25 5,000
1925-26 5,000
1926-27 7,000
1927-28 7,000
1928-29 10,000
1929-30 11,000
1930-31 10,000
1931-32 14,000
1932-33 17,000
1933-34 22,000
1934-35 24,000
1935-36 24,000
1936-37 25,000
1937-38 29,000
1938-39 31,000
1939-40 27,000
1940-41 23,000
1941-42 29,000
1942-43 34,000
1943-44 36,000
1944-45 39,000
1945-46 35,000
1946-47 35,000
1947-48 45,000
1948-49 46,000
1949-50 42,000
1950-51 48,000
1951-52 55,000
1952-53 54,000
1953-54 54,000
1954-55 56,000
1955-56 54,000
1956-57 60,000
1957-58 65,000
1958-59 60,000
1959-60 64,000
1960-61 75,100
1961-62 76,000
1962-63 85,000
1963-64 91,200
1964-65 78,800
1965-66 86,500
1966-67 93,000
1967-68 102,000
1968-69 108,186
1969-70 133,770
1970-71 138,775
1971-72 126,780
1972-73 132,245
1973-74 120,014
1974-75 96,000
1975-76 82,500
1976-77 107,000
1977-78 110,865
1978-79 123,179
1979-80 117,053
1980-81 118,344
1981-82 105,153
1982-83 108,900
1983-84 120,894
1984-85 118,320
1985-86 123,090
1986-87 132,800
1987-88 129,400
1988-89 125,700
1989-90 115,300
1990-91 105,000
1991-92 97,835
1992-93 99,000
1993-94 107,000
1994-95 134,000
1995-96 125,726
1996-97 126,807
1997-98 125,000
1998-99 116,000
1999-2000 122,600
2000-01 122,100
2001-02 125,000
2002-03 154,965
2003-04 166,754
2004-05 140,000
2005-06 164,553
2006-07 212,619
2007-08 229,203
2008-09 235,500
2009-10 264,077
2010-11 272,000
2011-12 210,00
2012-13 210, 00
[Source : FAO.]
Le cacao du Cameroun
Il est réputé pour sa forte teneur en beurre de cacao et sa couleur rouge cuivré, favorable à la fabrication du cacao en poudre. Il se caractérise par un arôme subtilement grillé et un goût puissant et doux à la fois.