Madagascar

 

 

 Indépendante depuis 1960, cette immense île, qui s’étend du 12° au 25° de latitude Sud, à 400 km de l’Afrique, produit quelque 6 000 tonnes de cacao par an, un cacao aujourd’hui unanimement apprécié. C’est le seul pays, avec Trinidad, à avoir un taux maximum de 100 % de « cacao fin » de type criollo dans ses chocolats.

Introduits à Madagascar vers 1887, probablement en provenance de La Réunion (1), les premiers cacaoyers criollos furent cultivés dans la région d’Ambanja — quelques plantations furent aussi créées à Sainte-Marie. Ces plantations restèrent d’abord limitées, en raison de l’insécurité des établissements agricoles et des difficultés d’exportation. En 1896, l’île exporta pour la première fois l, 689 tonnes. Et le cacao ne tarda pas à gagner du terrain. En 1905, d’après le bulletin L’Agriculture pratique des pays chauds, le cacaoyer poussait jusqu’à Mananjary. Sous-inspecteur de l’agriculture à Madagascar, Fauchère observe : « La région qui paraît devoir convenir le mieux à cette plante se trouve dans la partie située dans la partie moyenne de la côte Est, entre Mahanoro au sud et Sahambava ou Antalaha au nord. Au-dessous de Mahanoro le cacaoyer croît encore, mais il est probable qu’il y sera moins productif. / Des renseignements que nous possédons actuellement sur le régime météorologique de la côte Est, il semble résulter que les provinces de Tamarave, Fénérive et Maroantsetra sont celles où les cacaoyères sont appelées à prendre le plus d’extension. » Quant au cacao récolté, il était alors considéré comme d’une belle qualité. « C’est, certainement, une forme très voisine du Criollo du Vénézuéla, ajoute Fauchère. Ses produits sont, du reste, fort appréciés. M. Chantepie a fait expertiser le cacao qu’il récolte à Madagascar ; les experts de Bordeaux n’ont pas hésité à le classer parmi les meilleures sortes. / Les planteurs de la Côte est, qui vendent en France, réalisent toujours à des prix très élevés, dépassant souvent 110 francs les 50 kilos. »

(1) L’île Bourbon (île de La Réunion) aurait reçu le cacaoyer de Ceylan, « tant les fruits du cacaoyer de Madagascar ressemblent à ceux du Old Red Ceylon. Cette dernière forme serait, d’après M. Jumelle, issu du Criollo du Vénézuéla, primitivement introduit à Ceylan. » (L’Agriculture pratique des pays chauds, 1905.) Cette hypothèse est confirmée en 1906 par Aimée Faichère, sous-Inspecteur de l’Agriculture à Madagascar. Le cacao Bourbon était alors englobé dans l’appellation Cacaos des Îles (voir Caraïbes).

(2) Ce domaine devait être vendu en 1985, mais il conserva le nom de Millot.

Dans les années 1910-1920 furent introduits des forasteros (appelés ici tamatave). C’est dans les plaines deltaïques du nord-ouest, dans la vallée du Sambirano, dont le climat alterne saison sèche (avril-octobre) et saison humide (novembre-mars), que s’est concentrée la culture cacaoyère, d’abord sur une zone de moins de 50 km de rayon. Une des plantations les plus importantes fut celle créée en 1920-1922 à Andzavibé, à l’emplacement d’une très ancienne plantation de manguiers, par Lucien Millot (1878-1943), originaire de l’Ain et arrivé à Madagascar en 1901 — le plant-souche provenait du jardin botanique de Buitenzorghe de Java (auj. Bogor) [2]. Au début du XXe siècle, les grandes plantations coloniales fournissaient quelque 120 tonnes par an, soit la majeure partie de la production du pays. L’essor fut constant, et les exportations atteignirent, en 1936, 399 tonnes.

Dans les années 1970, les grandes plantations produisaient environ 650 tonnes par an d’un cacao de qualité supérieure. S’instaura ensuite un système de collecte, destiné à impliquer davantage les paysans dans cette production. Depuis sa création, en 2000, l’ADAPS (Association pour le Développement de l’Agriculture et du Paysannat du Sambirano) concentre ses efforts sur la structuration et le développement des différentes filières agricoles, dont celle du cacao. Avec l’assistance de l’organisation française AFDI Picardie (Agriculteurs Français et Développement International – Picardie), elle créa en 2004 deux coopératives villageoises pilotes. En 2010, elle comptait 25 coopératives. Mais elle se trouva confrontée au problème des rapports collecteurs-planteurs, qui ne sont, d’ailleurs, pas spécifiques à Madagascar : « Les collecteurs voient souvent d’un mauvais œil leur concurrence et ils n’hésitent pas à intimider les paysans. Ce sont d’ailleurs souvent les usuriers des producteurs : ils donnent des crédits aux paysans qui sont ensuite tenus de leur donner leur cacao pour les rembourser. Ce problème de paiement en cash du cacao livré par les producteurs est la principale difficulté des coopératives. Actuellement, elles ne payent leurs membres qu’une fois le cacao vendu à l’exportateur. Or, dans le cas du cacao sec, le délai de paiement atteint trois semaines. Ayant des besoins en trésorerie immédiats pour nourrir sa famille, le paysan va alors se tourner vers les collecteurs ; la coopérative aura ensuite du mal à honorer ses contrats et le paysan n’aura pas valorisé sa production au juste prix.. », explique Flore Ferraro (L’Information Agricole, n° 837, mai 2010). Seule la fidélisation des planteurs aux coopératives peut pallier à ce problème, et ce par de nouveaux services (bâtiments de stockage pour le cacao sec, aide au renouvellement des cacaoyères, etc.). Dans un souci d’améliorer le prix de vente, l’ADAPS s’est orientée vers la production de cacao « bio » et « équitable ». En 2010, sept coopératives bénéficiaient de la certification Ecocert.

Aujourd’hui, la cacaoculture constitue la grande activité des régions Diana et Sava, et, notamment, du district d’Ambanja (« Région du Sambirano [3] »), où, en 2009, 18 057 hectares étaient consacrés à la cacaoculture (4). Quelques 30 000 planteurs cultivent forasteros (60 %), trinitarios (35 %) et criollos (5 %) — ce cacao « à cosse claire » constitue une partie modeste, mais non négligeable de la production. La récolte s’effectue toute l’année, avec des pics en juin-juillet et en octobre-novembre. Il s’est vu décerner le label « cacao fin » par l’I.C.C.O. (voir organisation). Des organismes se sont mis en place pour en contrôler la production et en assurer le développement. Une plate-forme « cacao » réunit tous les acteurs de la filière. Un programme MAP (Madagascar Action Plan), conçu en partenariat par la filière cacao et l’État, a été consacré à l’avenir cacaoyer du pays, visant à accroître les exportations, à augmenter la surface exploitée de plus de 1 700 hectares, à régénérer les plantations par l’importation de jeunes plants provenant des pépinières d’Europe, à développer la coopération avec diverses organisations internationales (notamment, en matière d’appui technique), etc. Une initiative pour améliorer la qualité de production naquit en 2008 d’une accord entre l’État malgache et la firme allemande Schocolade Raush. Cependant, en dépit de ces tentatives, l’essor de cette production demeure freiné par divers facteurs comme la dégradation de l’environnement — le défrichement provoque la réduction de la pluviométrie annuelle et, par conséquent, la régression de la nappe phréatique — ou le taux élevé de sel de mer que supporte mal le cacaoyer. Presque toute la production de cacao actuelle est exportée, en fèves sèches ou en poudre de cacao — si un petit volume transite par le port d’Antsiranana, la majeure partie de la production est acheminée par le port de Nosy-Be (Grande île). En 2010 fut inaugurée, à Antafiamalama, dans la province d’Antsiranana (région Diana), une usine « SECAMAD » (Société d’Exploitation de cacao de Madagascar), spécialisée dans la production de pâte de cacao destinée à l’exportation (5). Par ailleurs, des fabriques de chocolat locales, de création récente, absorbent une petite part de cette production (voir ci-dessous).

(3) Prenant sa source dans le massif du Tsaratanana (nord-ouest de Madagascar), le fleuve Sambirano se jette dans la baie d’Ampasindava, après avoir été rejointe, au sud de la ville d’Ambanja, par la rivière Ramena. Est aussi baptisée Sambirano la plaine extrêmement fertile où coule la rivière.

(4) La production cacaoyère de cette région s’éleva à : 5 700 t en 2005, 5 800 t en 2006, 5 920 t en 2007, 7 799 t en 2008 et 7 865 t en 2009.

(5) Usine créée par le Groupe Vital, en collaboration avec un investisseur grec, Vassilis Arapglou, Le Groupe Vital est réputé dans l’exportation de cacao. L’investisseur grec œuvre dans la chocolaterie et possède une usine à Athènes-Greco depuis 1930. L’usine malgache a une capacité de production de 2 000 tonnes de pâte de cacao par an ; la pâte de cacao est obtenue à partir du cacao de la région du Sambirano.

Le cacao malgache

 

Fin et aromatique, il est amer et gras, corsé et puissant, légèrement astringent. Il s’impose par sa forme et sa présence en bouche. Des notes d’acidité et d’astringence sont perçues en fin de bouche. Cette acidité est liée à la fois au processus de fermentation et à la particularité du sol. Le Manjari se caractérise par son arôme fruité et acidulé qui évoque les fruits rouges, ainsi que par son intensité en bouche. Certains professionnels le recommandent pour les entremets alliant chocolat et fruits.

Commercialisée par Cacao Barry, la couverture de chocolat obtenue à partir du cacao Madirofolo se caractérise par son arôme aux notes florales, son corps robuste, son goût fortement cacaoté, légèrement fruité et poivré, marqué de délicates notes acidulées et de réglisse.

Le chocolat malgache

 

Une grande partie de la production de ce cacao de qualité supérieure est destinée à la consommation de la Grande-Île. Depuis 1939, une fabrique d’abord établie à Tamatave, puis transférée à Tananarive, fabrique un chocolat au goût fin, dont la production (en moyenne, 150 t/an) dépasse de beaucoup la demande intérieure (6). Aussi, en 2006, le chocolat malgache, représenté par les marques Moramora et Sambirano, entreprit la conquête de l’Europe. Celle-ci débuta par le Royaume-Uni qui, à partir d’un partenariat de type « équitable », apporta son soutien aux producteurs de cacao de la région d’Ambanja, où plus de 800 associations de planteurs bénéficièrent de l’encadrement de techniciens britanniques. Les marchés belge et français portèrent ensuite intérêt à la filière cacao malgache. Créée en 2005 par un exportateur de produits locaux (vanille, girofle, café, cacao), avec l’assistance d’un chocolatier français, la chocolaterie Cinagra fabrique du « pur chocolat de Madagascar ». Sa marque Menakao (de mena, « rouge » en malgache) [7], lancée en 2010 à l’intention des marchés étrangers, comporte différentes tablettes à destination des consommateurs et des couvertures (en gouttes ou en pains) pour les professionnels.

Le pays a également exporté ses chocolats en Afrique du Sud.

(6) La chocolaterie Robert, qu’avait fondée un couple réunionnais, appartieent aujourd’huiau groupe Ramanandraibe.

(7) Madagascar est surnommée « l’île rouge ».

Madagascar : production de cacao

en milliers de tonnes

1901-02                                              22,8 tonnes

1960-61                                               0,600

1961-62                                               0,500

1962-63                                               0,400

1963-64                                               0,530

1964-65                                               0,640

1965-66                                               0,735

1966-67                                               0,795

1967-68                                               0,825

1968-69                                               0,885

1969-70                                               1,000

1970-71                                               1,040

1971-72                                               1,240

1972-73                                               1,200

1973-74                                               1,560

1974-75                                               1,380

1975-76                                               1,557

1976-77                                               1,410

1977-78                                               1,530

1978-79                                               1,690

1979-80                                               1,690

1980-81                                               1,855

1981-82                                               1,895

1982-83                                               1,800

1983-84                                               3,000

1984-85                                               2,300

1985-86                                               2,400

1986-87                                               3,100

1987-88                                               3,600

1988-89                                               3,700

1989-90                                               3,600

1990-91                                               3,126

1991-92                                               4,000

1992-93                                               4,500

1993-94                                               3,000

1994-95                                               4,000

1995-96                                               4,300

1996-97                                               4,300

1997-98                                               4,300

1998-99                                               4,300

1999-2000                                            4,395

2000-01                                               4,410

2001-02                                               4,410

2002-03                                               4,410

2003-04                                               4,409

2004-05                                               5,861

2005-06                                               5,859

2006-07                                               4,500

2007-08                                               4,000

2008-09                                               8,000

2009-10                                               10,000

2010-11                                               6,500

2011-12                                               ????

2012-13                                               ???

 

[Source : FAO.]