Juillet 2024

 

Saint-Simon fut-il un adepte du chocolat ?

 

Il le mentionne à plusieurs reprises. Ainsi, lors de sa randonnée à dos de mule dans les Pyrénées, sur les chemins de Guipuzcoa, en compagnie du duc, il décrit l'église de Saint-Ignace et précise : « Nous y prîmes le meilleur chocolat dont j'aie jamais goûté » (VI, 810). Il  est vrai que les Jésuites en étaient amateurs (cf. I, 831, une affaire de contrebande).

Poisson d"avril à l'Opéra !

 

« A la vérité, on accordait aussi jadis des distinctions honorifiques aux directeurs de l’Opéra, mais la faveur ne dépassait jamais le grade de chevalier.
  Il y a même une bien jolie histoire là-dessus, à propos de feu Duponchel, de joyeuse mémoire.
Un jour, on n’a jamais su par quel artifice, un dragon arrivait rue Grange-Batelière au galop de son cheval. Ce cavalier avait à la main un de ces tubes en fer-blanc dans lesquels on enferme les dépêches qui ont besoin d’être tenues secrètes. 

  — Monsieur Duponchel, directeur de l’Académie royale de musique, dit-il.
  Aussitôt prévenu, le directeur accourt et signe au dragon un reçu en règle de l’envoi ; après quoi, il se met en devoir de lire le message.

  On lui annonçait en trois lignes qu’il venait d’être décoré de la Légion d’honneur. 

  Très-grande joie du bonhomme. Premier mouvement, il envoie au Palais-Royal quérir un mètre de ruban moiré rouge. Second mouvement, il fait commander au café Anglais un souper de cinq personnes pour ses intimes.

  Une demi-heure s’écoule, et il est toujours dans l’ivresse. Tout à coup, on gratte à la porte. Nouvel envoi. Celui-là contenait une croix fort bien découpée, mais en fer-blanc, avec cette inscription :
  — Présent du corps de ballet à M. Duponchel.
  Un peu piqué, le directeur ne prêta d’abord qu’une demi-attention à cette épigramme.
  — Ce sera le fait de quelque envieux, dit-il.
  Il n’avait pas fini de parler, que l’huissier lui apportait un autre paquet.
  — Qu’est-ce encore que ça?
  C’était une croix d’honneur en chocolat, moulée d’une manière irréprochable. On y avait ajouté cette légende :
  — Cadeau des habitués de l’orchestre de l’Opéra.
  Pour le coup, le digne homme comprit qu’on avait organisé contre lui tout un système de mystifications. Mais, pour n’avoir plus de doute à cet égard, il courut en toute hâte au calendrier et il y lut cette mention, si chère aux Parisiens de ce temps-là :
  Le 1er avril 1838 !
  — Le 1er avril ! Allons ! cette croix était un poisson moqueur, dit-il en se laissant tomber mélancoliquement entre les deux bras de son fauteuil.
  Ce ne fut qu’au bout de cinq ans que l’infortuné Duponchel put apprendre comment ce tour de page lui avait été joué par Nestor Roqueplan, son spirituel et irréconciliable ennemi. »

L'Illustration, 5 janvier 1878

Le chocolat de saint Pierre

 

« Le puffiste parisien n’est plus. Il a vécu ce que vivent les puffistes. Versons une larme sur sa tombe et ne parlons plus de lui.
Honneur, gloire et respect à son successeur, le puffiste provincial !
Oui, messieurs, Tours est l’endroit où réside celle mermeille, ce phénomène.
O décentralisation, voilà de tes coups !
Ce Barnum d’un nouveau genre n’exerce point son industrie à son seul profit. Non ! son but est d’offrir à ses concitoyens un moyen de faire leur salut spirituel sans bourse délier.
Oyez et jugez !
M. Galbrun-Deschamps, chocolatier, confiseur et distillateur en la bonne ville de Tours, vient d’inventer le Chocolat de saint Pierre.
Nous ne nous permettrions pas une semblable plaisanterie si elle n’était vraie et si le Journal d’Indre-et-Loire n’insérait à ce sujet les pompeuses réclames de M. Galbrun-Desehamps.
Le chocolat de saint Pierre est-il meilleur que le chocolat Perron ? N’en ayant pas encore croqué la moindre tablette, je ne puis répondre.
Je sais seulement que son inventeur le prône sur tous les tons en faisant appel aux catholiques du pays qui aiment le chocolat.
Mon dieu, oui ! M. Galbrun-Deschamps envoie au pape Pie IX dix pour cent sur les bénéfices qu’il réalise avec la vente de son produit étiqueté Chocolat de saint Pierre.
Il faut être tourangeau pour avoir trouvé celle-là, dirait un vaudevilliste sans pudeur.
Nous qui ne faisons pas de vaudevilles, nous en dirons autant.
Il faut en vérité que cet honnête commerçant ait bien envie de vider ses magasins pour offrir si généreusement au pape de l’associer dans ses bénéfices.
Et voyez la sournoiserie !
Ce respectable chocolatier, faisant appel aux cœurs restés fidèles à Pie IX, a soin de glisser dans son annonce les deux lignes suivantes que je cite textuellement, tant elles me paraissent dignes d’être encadrées :
« Véritable moyen pour l’acheteur de secourir l’infortune sans qu’il lui en coûte rien. »
Diable ! il me semble qu’alors la bonne action perd de son mérite.
Au jour du jugement dernier je serai curieux de voir comment seront traités les tourangeaux qui auront mangé du chocolat en l’honneur du pape.
Pourvu que ces braves gens n’abusent pas du chocolat de saint Pierre jusqu’à endommager leur estomac et se donner des indigestions ! Gela est à craindre surtout chez les catholiques fervents, dévoués — corps et âme, c’est le cas de le dire, — à la cause du saint-père.
Eh bien ! qu’en pensez-vous, chers lecteurs ? Avais-je raison de m’écrier en commençant *
Le puffiste parisien est détrôné !
Inutile d’ajouter que, depuis qu’il a eu cette triomphante idée commerciale, le chocolatier de Tours voit le nombre de ses clients augmenter tous les jours.
J’ignore quels sont les bénéfices réalisés par M. Galbrun-Deschamps depuis qu’il a fait cette admirable et ingénieuse trouvaille. J’aime à croire que les catholiques de Tours et des villes voisines vont nommer ce pieux négociant leur fournisseur breveté, et ce pieux négociant est capable de faire promptement une fortune colossale.
Une seule chose m’étonne : c’est que la Gazette de France, par l’organe de M. Janicot, n’ait pas encore révélé à ses trois abonnés le nom et l’adresse de ce protecteur du saint siège. Nous espérons bien qu’avant deux jours ce journal influent se livrera à un dithyrambe en l’honneur de l’heureux inventeur du Chocolat de saint Pierre. »

Jules Lagrange, dans Le Charivari, 5 décembre 1860

Le CHarivari, 12 septembre 1873

Les chocolats ferrugineux d'un pharmacien parisien

 

Les chocolats médicamenteux connurent leur âge d'or au XIXe siècle. Nombre de pharmaciens en fabriquaient… A Paris, les chocolats ferrugineux de Colmet (12 rue Saint-Merry), en pastilles et en tablettes, étaient d'autant plus appréciés qu'ils bénéficièrent, dans les années 1830 et 1840, d'avis médicaux des plus favorables. « Je reconnais avoir employé avec succès le Chocolat ferrugineux de M. Colmet, pharmacien, dans la chlorose, dans les maux d’estomac nerveux, dans les affections scrofuleuses, et dans tous les cas où il faut relever le ton des organes affaiblis. Paris, ce 2û septembre 1837. » , écrivit ainsi le docteur Pâtissier, de la Faculté de Paris, membre de l’Académie royale de médecine, auteur d’un traité des eaux minérales naturelles, etc. Une opinion parmi tant d'autres… Dans un article du 12 mai 1841, Le Charivari recense tous ces certificats médicaux en faveur du chocolat de ce pharmacien. Lequel produit se vendait, en 1842, 5 frs le demi-kilo ou 3 frs la boîte de pastilles…

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